Alain Gautier : « Bravo à tous ! »

Le septième Tour de Belle-Ile est pour Alain Gautier ! Souvent placés ces dernières années, le skipper de Sensation Océan et son équipage se sont imposés samedi sur le petit Tour, bouclant les 39 milles en 2h09’09’’, à 18,14 nœuds de moyenne. Forcément une satisfaction pour le Lorientais qui salue au passage la décision des organisateurs de lancer la course malgré des conditions musclées.

 Alain, vous aviez terminé deuxième en 2011, quatrième les deux années suivantes, vous voilà premier cette année, on vous imagine heureux de cette victoire sur le Tour de Belle-Ile ?
Oui, la victoire, c’est très bien, mais avec les conditions que nous avons rencontrées aujourd’hui, c’était surtout important de ne pas casser le bateau et de revenir avec un équipage en bon état parce qu’avec ce genre d’engin, on est vite en vrac. La victoire, nous y pensions, nous étions très focalisés dessus, mais comme le bateau souffre un peu dans ces conditions, je suis d’abord content de finir. Si en plus nous sommes premiers, c’est parfait !

Vous terminez 7 minutes devant Actual, y a-t-il eu match entre vous ?
Surtout au départ, nous sommes partis assez proches l’un de l’autre, mais après, forcément, comme notre bateau est plus grand, nous avons fait la course en tête. Nous aurions aimé avoir un peu plus de bagarre, mais tant pis pour les absents, ils ont raté une très très belle édition. Et surtout, je voudrais adresser un grand bravo au comité de course et à l’organisation, parce que ce n’était pas évident de lancer une course avec 500 équipages plus ou moins aguerris dans ce genre de conditions. Dans le monde dans lequel on vit, avec de plus en plus de contraintes et de règles, il fallait oser prendre cette décision, bravo à tous !

Racontez-nous ces deux heures de navigations à grande vitesse…
Le comité avait décidé sagement de nous envoyer sur le petit Tour de Belle-Ile, ça revient presque au même niveau distance (39 contre 42 milles, ndlr), le vent était comme souvent un peu plus fort que sur les fichiers, 25 nœuds établis. Heureusement, une bascule nous a permis de ne faire qu’un bord jusqu’au chenal de la Teignouse, ensuite nous avons eu trois bords à tirer pour aller jusqu’à la nord Poulains, il a alors fallu faire attention aux cailloux qui n’étaient pas loin. Jusque-là, nous étions un ris dans la grand-voile et petit foc, nous avons empanné, déroulé le génois plutôt que le gennaker, parce qu’il y avait de bonnes rafales sous Belle-Ile et que nous avions un peu d’avance sur Actual. Nous avons fait un très beau bord de reaching entre 30 et 35 nœuds jusqu’à la bouée de la pointe de Kerdonis, de nouveau empanné pour un nouveau bord de reaching jusqu’au chenal de la Teignouse où nous avons sans doute vécu le moment le plus incroyable du Tour, lorsque nous avons transpercé la flotte des monocoques qui étaient en train de passer la bouée sur le chemin aller. Nous à 25-30 nœuds tentant de trouver une place entre eux qui avançaient à 8 nœuds, c’est une image qui va rester dans les têtes de l’équipage pendant un bout de temps ! Pour finir, nous avons déroulé tranquillement le chenal jusqu’à la dernière bouée avant un dernier reaching pour terminer en beauté.

Les manœuvres dans ces conditions, ça devait être chaud !
Oui, au niveau équilibre du bateau, la combinaison petit foc-un ris dans la grand-voile n’était pas idéale pour faire les virements de bord. Nous avons perdu un peu de temps, mais c’est normal, sur Sensation Océan, l’équipage est composé en partie de gens qui se font plaisir pour venir naviguer, pas forcément aguerris, nous n’étions que trois professionnels. Donc il faut bien décomposer les manœuvres pour ne pas se retrouver dans des situations fâcheuses.

A l’arrivée, beaucoup de plaisir ?
Oui, surtout celui de faire plaisir à ceux qui étaient à bord. Les gens n’imaginent pas trop avec ces conditions ce que l’on ressent sur un tel bateau, c’était quand même tendu. Sur ces engins dans ces conditions, on n’est pas serein, même nous les pros, on sait qu’un tel trimaran peut chavirer, je suis bien placé pour le savoir ! Il faut être extrêmement concentré et vigilant. Donc je suis très heureux de leur avoir fait plaisir, et je pense que ceux qui ont vu le spectacle quand on a traversé la flotte des monocoques s’en souviendront comme nous !